Il était une fois le Front Populaire

Rêve Général

Synopsis
Synopsis Il était une fois l’été 1936. Dans un contexte difficile, des millions de femmes et d’hommes relèvent la tête pour retrouver le goût du partage et l’espoir en de jours meilleurs. C’est ce rêve, porté par le Front Populaire, qu’on vous raconte. De Trenet à Gershwin, de Nogent à Deauville, suivez avec nous le destin mouvementé d’une petite entreprise de banlieue, des luttes qu’ on y mène et des rêves qu’ on y fait.
Distribution
10 artistes sur scène : 4 chanteurs-comédien-musiciens + 6 danseurs. Piano, accorédon et guitare joués en live.
Infos
Durée du spectacle : 1h15 min.
Critiques
Rêve Général de la Compagnie Pliez Bagage à la Belle Etoile à Saint-Denis.
Ce vendredi 21 octobre, n’écoutant que son courage sans limite, votre serviteur en charge de #CultureDebout a traversé le périphérique pour se rendre dans la tristement célèbre ville de Saint-Denis. Pour le journaliste lambda et le Français qui l’écoute, Saint-Denis n’est qu’un repère de putes à crack, de « jeunes de
banlieues » assoiffés de sang et de djihadistes en puissance. Pour le militant impliqué et le citoyen averti,
c’est une terre de luttes et de promesses, où les cultures se rencontrent. C’est la patrie de l’ouvrier engagé
et du sans-papier désespéré. Et pour l’intermittent désargenté, c’est le siège des studios de télévision de la
Plaine-Saint-Denis.
Et pourtant, en descendant du métro à la station Front Populaire, Saint-Denis ressemble à toutes ces villes
nouvelles qui colonisent la banlieue parisienne. Les trottoirs sont larges et déserts, les bâtiments modernes
et impersonnels. Mais quelques centaines de mètres plus loin, se dresse la Belle Etoile, salle de spectacles
engagés tenue par la Compagnie Jolie Môme depuis 2004, ancienne salle des fêtes bâtie à la fin du XIXe
siècle, dont les murs retracent plus d’un siècle de luttes sociales à travers affiches, graffitis et slogans directement taillés dans la pierre. C’est un sanctuaire de la culture militante où passé et présent dialoguent, illuminant un quartier sans âme.
Bref, tous les ingrédients étaient réunis pour donner une saveur particulière à la représentation exceptionnelle, offerte par la municipalité, de la comédie musicale Rêve Général, qui aborde l’aventure du Front Populaire à travers l’histoire d’une usine textile de Nogent, de ses ouvrier-e-s à ses patrons, au cours de l’été
1936.
Le cadre aidant, le spectateur est tout de suite plongé dans la vie de ces femmes et de ces hommes qui
découvrent la possibilité de la grève, de la lutte et de l’espoir. Le contexte historique de la victoire du Front
Populaire sera résumé tout au long du spectacle par un banquier suffisant, très fier de posséder avec ses
amis pratiquement toute la presse (ça vous rappelle quelque chose ?) et par l’opposition radicale des unes
de l’Humanité et du Figaro scandées par deux vendeurs de journaux à la criée. Mais toute la saveur de Rêve
Général vient de l’évocation de la vie et des rêves de ces pionniers de la grève générale.
Par la danse et par le chant, d’époque uniquement, de Gershwin à Trénet en passant par l’Internationale
(reprise en chœur par le public de la Belle Etoile), c’est avec douceur, subtilité et humour que sont suggérées
les revendications des ouvrier-e-s, l’ambiance de fête des premières occupations d’usines, la découverte
de la plage et de ses plaisirs grâce aux premières semaines de congés payés. Les patrons, un frère à l’âme
d’artiste et une soeur frivole, sont moqués gentiment mais se révèlent n’être que d’autres victimes d’un système capitaliste qui, déjà, écrase tout sur son passage. Car la parenthèse de l’été 1936 passée, la gauche
au pouvoir plie déjà (bis) face à la finance et l’usine sera fermée. Ne restent alors que l’espoir de produire
autrement et déjà (ter) l’utopie de la coopérative, la SCOP en français administratif.
Echelle Debout 8/10 : Comme le laisse présager son titre – trouvé en novembre 2015, les grands esprits se
rencontrent – la comédie musicale de Thomas Cannariato, à l’écriture, et Madlyn Farjot, à la mise en scène
et la chorégraphie, possède une résonance particulière avec Nuit Debout. Elle est d’ailleurs émaillée de références à l’actualité sociale récente, de la chemise arrachée à la défense de la réduction du temps de travail
(Blum propose la semaine de 40h, « et pourquoi pas 35 » se gausse le contre-maître de l’usine). On pourra
peut-être lui reprocher de ne faire qu’effleurer le contexte historique du Front Populaire, mais le spectacle
vivant n’a pas forcément vocation à être didactique et élitiste. En parlant à l’âme, plutôt qu’à l’esprit, aux
sentiments plutôt qu’aux idées, il se fait plus universel, capable de toucher tous les spectateurs de l’érudit au
béotien et il incite à penser, à apprendre et finalement à rêver.
durée : 1h30.
Ndlr : L’échelle debout ne constitue en rien une note donnée à l’oeuvre mais permet seulement de la situer
par rapport au mouvement Nuit Debout.
Sébastien Novac. 28/10/2016.